Elections régionales et cantonales 1998

Non, non, il n'y a pas de bug dans ce blog ni dans ma tête (encore que !).
Tout simplement, je suis tombé sur cette interview de Mgr Louis-Marie Billé (publiée dans le journal La Croix du 25/03/1998), et je trouve que cette parole est encore et toujours d'actualité...

Le président Chirac a dénoncé lundi soir le Front national comme un parti raciste et xénophobe. L'Eglise, au nom de l'Evangile, condamne-t-elle aussi ses thèses ?
Mgr Billé : Il y a dans la doctrine du FN des éléments contraires au respect de la dignité de l'homme. Dignité qui ne dépend ni d'une race ni d'une nationalité. Toutefois, ce n'est pas d'abord en fonction du discours d'un parti que l'Eglise doit parler, mais en fonction d'un débat de fond, sur les valeurs. Le problème de la France, aujourd'hui, est de se réenraciner dans un consensus éthique qui fonde la démocratie. On fait comme si, tout à coup, se posaient des questions nouvelles.
Ce qui se passe avec ce parti est révélateur de problèmes qu'on ne peut pas ramener à sa seule existence. La montée de l'extrême droite est une provocation à résoudre le vrai et seul débat auquel nous sommes confrontés, celui des valeurs sur lesquelles nous fondons la démocratie.
Le FN profiterait, selon vous, d'un relativisme éthique ?
Mgr Billé : C'est l'une des questions que l'on peut se poser. Ce qui se passe dans le paysage politique français nous renvoie, je le répète, à la définition d'un consensus éthique grâce auquel la nation peut vivre.

Vous semblez renvoyer dos à dos le FN et la classe politique ?
Mgr Billé : Absolument pas. Il s'agit d'engager le débat sur le terrain des valeurs fondamentales et dont nous nous préoccupons trop peu. Sur quoi allons-nous fonder un « nouvel élan républicain » ? Telle est aujourd'hui la seule vraie préoccupation. L'Eglise n'a pas à se situer sur le terrain des stratégies politiques. Pour l'Eglise, ces fondations relèvent d'une certaine conception de l'homme, d'un respect de la dignité humaine sous tous ces aspects et d'un vouloir vivre ensemble.
Appartient-il à la conscience personnelle des hommes politiques d'accepter des alliances avec le FN ?
Mgr Billé : Il est nécessaire que l'on trouve dans la vie politique de la clarté, du respect du meilleur des engagements pris. Il y a beaucoup de manières de faire appel à sa conscience. Si cela signifie, « je n'ai de compte à rendre à personne, les autres n'ont rien à me dire », ce n'est pas la bonne manière. La conscience a besoin d'être éclairée.
L'Eglise a-t-elle suffisamment joué son rôle pour éclairer ces consciences ?
Mgr Billé : Lorsque la maison brûle, on fait tout d'un coup appel à l'Eglise comme si elle pouvait apporter des pompes à incendie. Notre travail est, à longueur de temps, d'éclairer les consciences, en nous préoccupant de la lutte contre la pauvreté, de contribuer à réduire la fracture sociale, de tout ce qui peut favoriser la famille, l'éducation des enfants, l'accueil des étrangers...
L'engagement de l'Eglise se situe au niveau de ces valeurs fondamentales.

Recueilli par
Bernard GORCE

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